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Des mots pour l'écrire...
1 novembre 2014

Sois sage ô ma douleur

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Depuis quelques jours, environ deux semaines, enfin depuis le 17 octobre, je vis une expérience que je n'avais jamais vécue auparavant. 

J'ai eu quelques pépins de santé dans ma vie, j'ai donné la vie trois fois mais tout ceci sans trop de douleur. Enfin, je crois. 
Je trouve cette notion difficile à évaluer, je ne sais dire si je suis douillette ou pas, si ce que je ressens dans mon corps serait supportable ou pas pour quelqu'un d'autre. Si cela paraîtrait pour lui indolore, ou au contraire difficile à assumer. 

Bref, depuis ces quelques jours, la douleur m'attaque, me ronge, me bouffe. C'est venu assez brutalement, mais je trouvais des subterfuges pour contourner, supporter. Une certaine position de mon bras, qu'il fallait modifier régulièrement. Mais la progression a été telle que dès le lendemain je n'ai plus pu dormir quasiment. La douleur était incessante, aucune position ne parvenait à me soulager, aucun médicament. 

j'ai d'abord fait un passage aux urgences de l'hôpital, où on m'a demandé d'évaluer de 0 à 10. J'ai dit 8, conservant ainsi une marge de manoeuvre. Je ne criais pas, ne manifestais pas, même en accouchant je n'ai jamais crié ;) D'ailleurs les naissances des trois merveilles se sont bien déroulées, sans péridurale et sans difficulté. 

A notre époque aseptisée, où la maladie doit être sans odeur, ni douleur, on n'en revient pas que rien ne puisse soulager. j'ai pris scrupuleusement les médicaments, que je supporte bien d'habitude. Cette fois ils m'ont retourné l'estomac, me détraquant, m'emmenant au bord du malaise, des vertiges, des nausées. 

Puis ce fut le temps de l'infiltration, la troisième en un an. Inefficacité totale. Comme si je n'avais rien fait. J'ai pourtant serré les dents au moment de l'injection. Gardant l'espoir d'un soulagement à venir, et qui n'est pas venu. 

Je m'en voulais de ne pas me sentir mieux, soulagée. Je m'en voulais de faire partager ça à mon amour qui par empathie souffrait pratiquement autant que moi, et que j'ai empêché de dormir paisiblement toutes ces nuits. 

Mais pourtant, l'introspection forcée et continue à laquelle la douleur nous oblige me dictait bel et bien que le mal ne décroissait pas, au contraire. 

Cela vire à l'obsession, guetter la douleur qui monte, la sentir se suspendre, se retirer, ô pas longtemps, juste quelques secondes et encore. puis la voilà de retour, encore plus agressive, plus mordante. La pire étant aux heures de la nuit, se retourner dans le lit, d'un côté, de l'autre, ne pas trouver de repos, ne pas trouver de répit. Elle recouvre tout, annihile toute pensée logique et sereine. On se demande juste quand cela va cesser, on n'ose même pas croire que ça puisse cesser. Elle se glisse dans le moindre interstice, laissant croire qu'elle va partir, pour mieux revenir vous assaillir. On devient elle, on se confond avec elle, elle est obsession, torture et occupe toute la place. 
C'est ainsi que de retour en consultation d'urgence, le médecin n'a pas eu d'autre solution que de me prescrire de la morphine. Le soulagement n'est pas immédiat, il vient une heure après la prise, il n'est pas total mais il apaise un peu le monstre tapi dans mon bras. C'est un pincement douloureux là où c'était un étau métallique qui broyait tout. 

C'est ainsi que depuis une semaine je tiens le coup. Mais je n'en peux plus d'attendre un soulagement définitif. Il devrait arriver mardi, avec une intervention chirurgicale. Je ne la redoute pas, je l'attends, je l'espère, j'en attends les bénéfices promis. Et qu'enfin la satanée douleur parte, pour de bon. 

Cela m'a légitimisée que le chirurgien en voyant les résultats de l'IRM me dise que je n'étais pas douillette et qu'il me plaignait. Je me suis sentie le droit de souffrir et de l'exprimer. 

Je sais que d'autres souffrent sans doute plus que moi, que j'ai de la chance,  car dans mon cas il existe une solution, et qu'elle va arriver rapidement, dans trois jours. Je suis emplie de compassion pour les gens qui souffrent, partout dans le monde, je l'étais déjà avant, je le suis en connaissance de cause à présent. Et j'imagine quelle terreur doit les emplir à l'idée que rien ne se profile pour les soulager. 

C'est aussi le type d'expérience qui remet les choses à leur place, fait ressortir ce qui est important dans la vie. Cela fait revenir à l'essentiel... et cela rend plus fort. 

 

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Commentaires
L
J'ai l'impression que c'est une différence de genre. Je n'ai pour ma part aucun problème pour dire "j'ai mal", pour évaluer cette douleur et la juger inacceptable. Le pire que j'ai connu étant le calcul rénal avec deux moments particulièrement marquant : devoir m'allonger sur le sol de la cuisine pour tenter de calmer le monstre qui prenait place en moi et me retrouver tellement plein de cette douleur que j'ai été incapable de parler, d'appeler à l'aide. L'autre étant dans le bureau des infirmières après la radio que j'avais du passer pour savoir ce qui se passait dans mon corps (encore merci aux opérateurs radio qui prenaient tranquillement leur café pendant que j'attendais à moitié à poil, grelottant et écoutant déjà la montée de la douleur en moi !), le bureau des infirmières donc donc où je me suis simplement effondré, assis, le dos contre un pilier et là aussi, incapable de parler, d'exprimer le moindre mot. Elles ont été géniales et ont compris de suite le problème, m'ont amené un lit, une perfusion de médicament et aussitôt de la morphine.<br /> <br /> L'une d'elle plus tard m'a dit : j'ai eu deux enfants et je peux vous dire que le calcul rénal, c'est une douleur bien pire que d'accoucher !<br /> <br /> A l'évaluation de ma douleur sur une échelle de 1 à 10, j'ai attribué 12. C'est à dire au delà de ce que je pensais possible.<br /> <br /> <br /> <br /> J'espère que l'opération va te soulager en tout cas ! :-)
C
Je sais depuis quelques jours ce que tu souffres ma douce ... et le fait que tu te résignes à cette opération montre que ta souffrance est devenue vraiment insupportable ... je suis avec toi dans cette épreuve comme je le serai toujours ! Je te <3 ! et tu le sais .. je te promet une délivrance !
I
c'est la chose qui m'a frappée de plein fouet en accompagnant un proche dans un cancer (si tant est quo'n puisse accompagner quelqu'un dans une maladie) : la douleur, celle qu'on ne veut pas voir, celle dont on ne parle jamais, celle qu'on imagine pas, celle qu'on masque derrière les mots "longue maladie" mais surtout celle contre laquelle on perd même avec les médicaments les plus modernes. Courage
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